Un domaine comme Cortils a accueilli au cour de son histoire de nombreux habitants, des nobles mais aussi des métayers, des exploitants agricoles. Nous savons qu'à une époque récente, dans l'après guerre, 5 familles de fermiers occupaient les lieux en même temps.
Au moment du rachat en 2005, il reste un fermier en fin de carrière et sa famille, et quelques locataires résidents.
Le défi de ce genre de site c'est de pouvoir générer des revenus pour garantir la restauration mais aussi l'entretien à long terme, faire du tout un ensemble cohérent et durable. Certains lieux doivent être réaffectés tout en gardant l'esprit de l'ensemble, sans dénaturer. On veut vivre dans le confort moderne, en utilisant les matériaux d'autrefois. On veut conserver un équilibre entre logement permanent, accueil touristique et activités professionnelles.
Lors de la demande de certificat de patrimoine en 2009, voici quelles étaient les intentions :
"Une aide ponctuelle ne sauvera pas ce domaine à long terme. Dans 30 ans, les efforts devraient être renouvelés. Rien que les façades et les toitures exigeraient 3 millions d’euros. Le projet sera réalisable financièrement si les coûts sont subsidiés et répartis sur 20 ans.
Ce qui est important pour la survie et la conservation de ce patrimoine culturel c’est qu’il vive à nouveau. Si le château veut être rentable et pouvoir faire face à des frais d’entretien sans cesse renouvelés, les bâtiments vides actuellement devront retrouver après rénovation, une fonction.
Chaque m² doit être loué à des gens qui sont impliqués dans l’ensemble du projet. [...] L’objectif du projet est aussi de rendre le patrimoine de Cortils accessible au public. [...]
Il y a actuellement 8 logements habitables. La « maison du cocher » et les remises sont vides et dans un état de délabrement avancé. La plupart des fenils situés au-dessus des écuries sont vides et des caves voûtées sont inutilisées.
Après restauration, des nouvelles fonctions devront être attribuées sans quoi la dégradation des bâtiments se reproduira. Pour rendre l’implication des habitants optimale, ces fonctions doivent dépendre et se renforcer, se soutenir les unes les autres. Ce sont des fonctions à caractère social, culturel et philosophique, des fonctions qui vont dans le sens du développement personnel, de la relation à l’autre et à l’environnement et orientées vers l’écologie.
Pour accueillir des visiteurs et héberger des volontaires, il faut prévoir un certain nombre de lits, une salle à manger avec cuisine, une salle de cours/réunion/conférence, une réception avec centre d’informations et l’administration, etc. Pour réhabiliter les jardins, il faut prévoir des abris et ateliers. Pour la détente, il faudra aussi prévoir des espaces. [...]
Pour garantir une diversité entre les âges (de 0 à 100 ans), on aura besoin au minimum de 4 habitations pour personnes âgées parmi lesquelles 2 au moins seront accessibles à une personne à mobilité réduite. Ces habitations prévues pour être de taille modeste, pourraient également servir de logement occasionnel ou temporaire."
Pour la demande de réaffectation de la zone nord, on garde le même esprit :
" Esprit de restauration.
Comme lors de la restauration des bâtiments de la zone sud, qui ont fait l'objet d'un précédent CP, les interventions sont les plus discrètes possibles. Le maître d'ouvrage et auteur de projet, une seule et même personne, choisit de conserver le vécu des bâtiments, la patine, les témoignages du temps passé. Ainsi il n'y aura pas de sablage, de rejointoiement systématique. Les pierres de taille fendues ne sont pas remplacées mais plutôt recollées. Si elles sont descellées mais ne menacent pas la stabilité, elles seront laissées en l'état. Les boiseries existantes sont décapées et remises en peinture. Dans la mesure du possible, les matériaux d'origine sont réutilisés : badigeon de chaux, mortier de chaux, brique pilée, ardoises, moellons, briques terre cuite.
Interventions urgentes.
L'état des toitures réclame de manière générale sur l'ensemble du site, une attention particulière. Les ardoises sont fréquemment poreuses, perforées, friables. Des remplacements variés au cours des décennies ont créés des ensembles inharmonieux (tuiles, ardoises naturelles, ardoises type Eternit, différents formats). Les corniches manquent cruellement d'entretien et des renouvellements s'imposent. Le maître d'ouvrage souhaite réfléchir à une uniformisation des toitures d'un point de vue esthétique : la même couverture sur l'ensemble du site ? Ou différencier les toitures en fonction de leur utilisation/prestige : corps de ferme, château, dépendances ...
La priorité néanmoins parait être l'étanchéité et la durabilité des toitures.[...]
Réaffectations.
Pour la pérennité du projet, il convient de considérer le site comme un ensemble autosuffisant. L'objectif du propriétaire étant de générer au maximum les revenus qui serviront à la restauration puis à l'entretien du domaine. Dans cette optique plusieurs options sont déjà fonctionnelles : remise en état du potager intra-muros, petit bétail (moutons, poules), bois de chauffage lors du nettoyage des bois alentours, locations touristiques pour une partie des logements disponibles.
La ferme sera prochainement libérée de son exploitant actuel et pourra être progressivement réorientée vers l'agriculture biologique, conformément au souhait des propriétaires.
D'autres sources d'énergie sont également recherchées : énergie géothermique, solaire.
Les habitants permanents du château de Cortils sont investis dans sa restauration et participent à son entretien.
Dans cette optique globale, une partie des bâtiments agricoles seront réaffectés afin d'agrandir la capacité d'accueil et d'hébergement. Plusieurs bâtiments ne correspondent plus aux besoins actuels en terme d’exploitation agricole (ouvertures trop étroites).
Harmonisation.
Une partie des bâtiments agricoles a subi au cours du temps des "maltraitances" : percements intempestifs et non intégrés, pour les besoins des générations d'agriculteurs qui s'y sont succédé. Le souhait est ici, de chercher au niveau des maçonneries un compromis entre le respect du vécu des bâtiments et la réparation des dommages causés par le passé (voir façade nord des écuries F5, côté étang). En clair, dans cette zone (J1) les entrepôts en tôle, nécessaires pour abriter les machines agricoles, devront être à terme démontés. La haie de conifères qui cachent cette zone aux yeux du promeneur pourra être abattue et permettre ainsi à nouveau la connexion entre la ferme et l'étang.
L'auteur de projet propose la construction au même endroit d'un entrepôt semi-enterré, qui accueillerait machineries diverses. Un parapet en pierres, moellons et briques de récupération délimiterait une terrasse extérieure qui permettrait de bénéficier pleinement de la vue sur l'étang. [...]
Mortier, 21 janvier 2014.
Boudewijn Laugs, architecte, maître d'ouvrage et auteur de projet."